Espaces naturels sensibles, Nature, Zones humides, Flore, Faune

Tourbière des Moussels Une restauration réussie en Montagne Noire

chantier de restauration de la tourbière des Moussels chantier de restauration de la tourbière des Moussels

Depuis 2022, un chantier de restauration de la tourbière des Moussels, commune des Martys, a été engagé en partenariat avec les propriétaires, le GAEC Lassalle, et Ecodiv, association naturaliste, à raison de deux semaines par an. 2025 marque enfin l'achèvement de ces opérations, que les élus du Département, de la commune et d'autres partenaires ont pu récemment découvrir.


 

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Du diagnostic aux travaux : sensibiliser les éleveurs à la préservation des zones humides

Depuis 2021, la Chambre d'agriculture de l'Aude et l'association naturaliste basée dans le Lauragais, Ecodiv - avec le soutien financier du Département de l'Aude au titre de ses compétences "espaces naturels sensibles" et de l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée - développent un programme appelé "zones humides en Montagne Noire" auprès des éleveurs possédant des prairies, des mares, des boisements alluviaux et des tourbières. L'idée est, sur la base du volontariat, de les sensibiliser à la protection de ces milieux très particuliers, de mieux les étudier, et d'apporter à leurs propriétaires des recommandations concernant leur utilisation dans la conduite de leur exploitation.

Concrètement, après des inventaires faune et flore et une analyse agro-pastorale, l'agriculteur se voit proposer un certain nombre d'actions de restauration et de conseils de gestion de ses zones humides. Milieux riches en biodiversité, elles sont aussi une sorte de "réservoir" faisant office d'éponges stockant l'eau quand les précipitations sont fortes, et la relarguant doucement quand la sécheresse menace.

A cet effet, le Groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) Lassalle, présent tout en haut de la Montagne Noire sur la commune des Martys, a reçu les experts en 2021. Lesquels ont analysé près de 30 hectares de zones humides sur le lieu-dit les Moussels.

Retirer des arbres pour retrouver la fonction hydrologique de la tourbière

Une tourbière, milieu très rare sur ce secteur du département, a particulièrement attiré l'attention des partenaires de ce programme. Au-delà d'une très belle biodiversité constatée - 11 espèces patrimoniales ont été recensées pour la flore - , il est à déplorer une fermeture du milieu par envahissement naturel de ligneux tels que saules, bouleaux et pins, mettant en danger la biodiversité du site mais également les fonctionnalités hydrologiques. Il a donc été préconisé des opérations de restauration.

C'est ainsi que le Département a voté sur 4 ans des subventions pour un total de 62 000 € afin d'engager des travaux de suppression de ces ligneux qui se sont déroulés à l'étiage, soit en septembre, avec une collaboration efficace entre les éleveurs et Ecodiv. Des suivis post-travaux de la flore et des journées de sensibilisation grand public et public scolaire ont été également proposés. A noter que, le 5 août, la balade fraîcheur de l'office du tourisme de la Montagne noire a pu accueillir sur ce site quelques 100 personnes.

En cette dernière année, Ecodiv renforcée par deux personnes de l'association Le chant des grenouilles a réussi, dans les délais impartis, à traiter le dernier secteur de cette tourbière. Cette année a vu, également et comme particularité, l'intervention de l'entreprise ACTIFOREST, basée dans l'Aude, pour traiter la partie la plus en amont, qui est la plus sèche et qui peut donc accueillir des pelles mécaniques et un chaptrack grâce à un sol suffisamment portant. Les pins sylvestres de belles tailles ont été abattus et girobroyés.

Une technique de restauration respectueuse de l'existant


Le dernier jour des travaux, fin septembre, les éleveurs ont souhaité inviter tous les partenaires ayant œuvrés à cette restauration, notamment les élus mais aussi des naturalistes voulant bénéficier du retour d'expérience que peut valoriser ECODIV.

Jean Muratet, naturaliste au sein d’Ecodiv et chef des travaux, a pu montrer comment lui et ses collègues ont œuvré pour retirer les ligneux envahissants, encore d'un diamètre modeste, sans endommager le sol de cette tourbière, lequel est très peu portant vu la forte présence d'eau. Un treuil forestier, activé grâce au tracteur des éleveurs, permet de tirer un câble enserrant l'arbre : un tableau de commandes permet de tendre ce câble et le treuil déterre facilement tel saule, tel bouleau qui ensuite est évacué de la tourbière pour être broyé. Ce travail patient, exigeant physiquement, explique le temps passé sur ce chantier afin d'arriver à traiter quelques 4 hectares.

Une faune et une flore inféodées aux tourbières

Les bovins de cet élevage pourront donc profiter de cet herbage, si le sol porte assez. Ce travail vise aussi à assurer la présence de la plus importante population de Drosera à feuilles rondes recensée sur la Montagne Noire audoise. Une plante carnivore attirant sur ses feuilles "collantes" des insectes afin de trouver la ressource alimentaire qu'elle ne peut prélever par ses racines plongées dans cette tourbière. Les personnes présentes lors de cette présentation des travaux ont pu admirer cette plante  discrète et de très petite taille. D'autres plantes patrimoniales, sans oublier quelques amphibiens et autres insectes adaptés à ce milieu, sont visés par ces travaux afin de leur permettre de retrouver un écosystème rare sur le secteur et indispensable pour assurer tout leur cycle de vie. De nouveaux inventaires et des suivis notamment concernant la flore et  la présence d'orthoptères patrimoniaux seront réalisés dans les prochaines années.

Le programme zones humides en Montagne Noire aura d'autres chantiers de ce type à organiser l'année prochaine, chez d'autres éleveurs concernant des prairies humides. Et il pourra alors démontrer une fois de plus qu’agriculteurs et naturalistes peuvent collaborer dans le sens de l’intérêt général.

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